Leur objectif est de réaliser un portrait de frère et soeur dans le quotidien face au handicap, en montrant leurs liens dans les soins si il y en a, dans les activités, les échanges, etc. pour faire un portrait de famille.
Une équipe vient filmer 3 jours dans la famille, il y a aussi une interview sur le plateau pour lancer les reportages.
Après discussion en famille nous avons décidé de ne pas faire ce reportage. Filmer nos lieux de vie diffusés à grande échelle chez n'importe qui, montrer notre vie dans le quotidien, etc. pour nous cela rentrait trop dans notre intimité et ne nous correspond pas, il faut sans doute une bonne part d'exhibitionnisme dans sa personnalité pour accepter cela et nous ne l'avons pas puisque pour nous ce n'est pas acceptable de le faire nous. Ce n'est pas un jugement de valeur pour ceux qui le font mais juste que cela ne correspond pas à notre personnalité.
Pour nous les sites babelle.web et soeurise ont pour objectif de faire partager les réalisations d'Isabelle (peintures et textes), de faire savoir les actions que nous faisons autour de ces réalisations et de montrer la richesse de notre relation de soeur dont l'une a un handicap qui la rend dépendante et ne lui permet pas de vivre une vie ordinaire : elle ne peut pas avoir son propre appartement (elle vit en établissement spécialisé la semaine et chez ses parents pour les vacances et les WE), elle ne peut pas travailler, pas fonder de famille si elle le souhaitait, etc.
Les journalistes de l'émission pour TF1 (émission "C'est quoi l'amour" présentée par Carole Rousseau) ont été très bien, claires dans leur demande, compréhensives. Leur demande est pour nous une très bonne nouvelle car elle nous prouve à nouveau que nos sites web créés cet été correspondent à ce que nous voulons faire et suscitent l'intérêt parmi les innombrables sites qui existent sur Internet.
Après une journaliste d'un magazine national qui nous a contacté dans les mêmes conditions (juste après avoir vu nos sites web) avec un article sorti fin novembre 2007.
Après une plasticienne professionnelle qui nous a contactées juste pour avoir vu des dessins d'Isabelle sur Internet, rencontre qui a permis de répondre à un appel à projet avec le projet sélectionné (Biot) et de monter en plus une exposition (Valbonne). Belle rencontre sans obligation (très différent des professionnels qui interviennent parce qu'ils sont payés pour cela et ne choisissent pas la personne avec laquelle ils travaillent), sans recommandation par qui que ce soit en plus.
Le projet pour TF1 est donc pour nous une réussite même si nous ne le faisons pas. Il est dans la suite des belles histoires qui se tissent à partir de nos sites et surtout grâce aux réalisations d'Isabelle, vues pour elles mêmes et qui parlent largement, sans chargé de communication pour les promouvoir, sans même de recommandations par des amis et de la famille, juste par une rencontre directe. Plaisir qu'Isabelle puisse être reconnue comme une personne apportant du positif aux autres, comme une personnalité à part entière.
C'est très précieux car les personnes handicapées dépendantes comme elles sont trop souvent vues, uniquement ou avant tout, comme des dossiers sociaux, des charges pour la société par le cout financier de leur prise en charge, une gène visuelle pour les personnes "normales" puisqu'elles font désordre dans un paysage où rien que les kilos en trop, les rides et une situation professionnelle non valorisante sont un handicap en soi. Comment vivre une belle vie quand on ne peut pas travailler, quand on ne peut pas avoir le physique d'un mannequin même avec un régime sévère, quand on ne peut pas choisir de fonder ou pas une famille, quand on n'a pas d'autonomie financière quand on ne peut pas être autonome pour la vie courante.
Cela me rappelle un texte d'Isabelle :
" Nous autres handicapés sommes souvent considérés comme des êtres différents. Nous ne sommes pas acceptés comme des êtres égaux aux autres. Bien souvent, hors la pitié ou la compassion, peu de cas est fait de nous. Comme être social nous n’avons pas droit à la parole quand nous n’avons pas la capacité physique de nous exprimer nous-même directement.
Nous sommes comme les indiens dans les réserves, mis à part, assistés, en attendant que la médecine fasse des progrès pour nous éradiquer d’une société qui ne veut pas de nous au fond.
Mis à part dans des établissements, nous sommes avant tout un secteur économique qui crée des emplois et qui permet à la société de se donner bonne conscience.
Nous ne sommes pas réellement consultés pour nos choix de vie, tributaires du désir des familles et surtout des professionnels dont nous dépendons pour notre survie quotidienne.
La liberté que nous avons est intérieure.
Nous sommes contraints de nous construire un monde intérieur qui nous permette de vivre et qu’hélas nous ne pouvons que rarement partager. C’est cette énergie, issue de notre monde intérieur, qui nous permet de vivre malgré tout, et qui est notre participation à la société quand nous pouvons la partager avec ceux qui sont suffisamment ouverts pour la recevoir. "
Cela me rappelle aussi d'autres textes d'Isabelle par exemple :
~> "Je pense que nous sommes des passeurs d’énergie pour les autres nous personnes handicapées, nous obligeons les autres à s’interroger sur leur vie et les vraies valeurs de la vie. Nous sommes les poils à gratter des habitudes et de la vie facile qui sinon passe sans que les humains ne se rendent compte de sa fragilité et de sa beauté."
~> "Je suis vivante et fière d’être aimante pour l’humanité même si tous les êtres humains ne respectent pas toujours la part entière de respect auquel j’ai droit tout comme eux. Je veux leur dire dommage mais dommage pour eux : moi je suis là quoi qu’ils pensent, aussi entière et humaine qu’eux. La vie en moi est la même et je suis heureuse de vivre quoi qu’ils puissent penser et quoi qu’il arrive. Mais cependant, c’est un voile de tristesse qui se pose parfois quand je ressens leur gène, leur commisération voire leur mépris ; c’est dommage mais je continue ma route et j’espère qu’un jour ils sauront ouvrir leurs yeux du coeur pour nous rejoindre dans notre humanité."